Pourquoi ?... Il n'a pas besoin de raison, l'Ankou, avec sa charrette
dont l'essieu grince toujours : "Wik... Wik..." Il croise ou s'introduit
chez les êtres, ne se fâche jamais après quiconque. Il les fauche,
c'est tout. De maison en maison, c'est son travail, à l'Ouvrier de la
Mort.
Si vous ne lisez que ces lignes;
Un roman écrit avec la verve propre à Teulé basé sur une histoire vraie; celle d'Hélène Jégado, née à Plouhinec en 1803 et décédée à Rennes le 26 février 1852, qui tua tout au long de sa vie, semant des morts dans toute la Bretagne.
Ne faisant aucune distinction, elle empoisonne comme par distraction ainsi que si elle lançait des graines aux pigeons.
Jean Teulé;
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi_bWsGBuh3gv2rOhi3Ns_YFZXGWwj3DsULH9DinGMVlYOuDwXrk7vjt3FSOsOg7XswQDtR9J4Q8tH1LdXY1k2c2v_lD2efrdnJmzgn6YMmdjavpcM_C-T2eaF_l1EaFD5hp8hrORVR8-Pu/s1600/Teul%C3%A96.jpg)
Teulé avait alors débuté l'adaptation du roman de Jean Vautrin, Bloody Mary, dont les premières pages étaient parues dans le dernier numéro de l’Écho. Publié par Glénat en août 1983, l'album rencontre le succès critique et obtient lors du festival d'Angoulême 1984 un prix remis par la presse spécialisée, lequel prend le nom de Prix Bloody Mary.
Après avoir été un homme de télévision (L'assiette anglaise de Bernard Rapp et Nulle part ailleurs sur Canal+) , un scénariste, un comédien et un cinéaste, il se consacre à l’écriture. Ayant abandonné toute autre activité, il s'y consacre totalement en 1990.
L'Œil de Pâques (1992)
Ballade pour un père oublié (1995)
Darling (1998)
Bord cadre (1999)
Longues Peines sur une idée de Jean-Marie Gourio
Les Lois de la gravité, Ô Verlaine ! (2004)
Je, François Villon (2006), Le Magasin des suicides (2007)
Le Montespan (2008)
Mangez-le si vous voulez (2009)
Charly 9 (2011)
Fleur de tonnerre (2013)
Le pitch
Ce fut une enfant adorable, une jeune fille charmante, une femme
compatissante et dévouée. En apparence.
Elle a traversé la Bretagne de part en part, tuant avec détermination tous ceux qui croisèrent son chemin : les hommes, les femmes, les vieillards, les enfants et même les nourrissons, sans haine aucune, juste en poursuivant son macabre destin.
Elle s'appelait Hélène Jégado, et le bourreau qui lui trancha la tête le 26 février 1852 sur la place du Champs-de-Mars de Rennes ne sut jamais qu'il venait d'exécuter la plus terrifiante meurtrière de tous les temps.
Elle a traversé la Bretagne de part en part, tuant avec détermination tous ceux qui croisèrent son chemin : les hommes, les femmes, les vieillards, les enfants et même les nourrissons, sans haine aucune, juste en poursuivant son macabre destin.
Elle s'appelait Hélène Jégado, et le bourreau qui lui trancha la tête le 26 février 1852 sur la place du Champs-de-Mars de Rennes ne sut jamais qu'il venait d'exécuter la plus terrifiante meurtrière de tous les temps.
Fleur
de tonnerre, pensive face à l’océan, éprouve en elle un abîme de vide. La vue
de cet infini stérile l’attriste aux larmes. Là-bas, des îles ressemblent à des
baleines endormies et, plus près de la côte, les ilots rugueux aux colorations
somptueuses semblent être des bijoux sertis par l’écume argentée des vagues.
Ce que j'en ai pensé
Comme pour tous
les livres que j'ai lus de cet auteur, (Longues Peines; Je, François Villon et
Mangez-le si vous voulez), c'est le choix du sujet qui m'a attirée. Parler
des maudits de l'humanité c'est une des qualités qui me font acheter les livres
de Teulé.
Ici, l'histoire
adaptée et romancée de la vrai Hélène Jégado, tueuse en série sociopathe,
dans une Bretagne païenne m'a tout de suite attirée. Surnommée par sa mére qui la voit un jour vouloir ramasser des fleurs réputées pour attirer l'orage, c'est sous le nom de Fleur de tonnerre que Jean Teulé l'évoque principalement tout au long du roman.
La répétition du
mode opératoire de Fleur de tonnerre, soupes et gâteaux à la reusenic'h (arsenic), a pu en
lasser certains mais ce n'est pas mon cas. J'ai trouvé dans cette répétition
une analogie avec un sentiment d'immortalité, telle que devrait l'avoir un
personnage comme l'Ankou, tandis qu'en parallèle le corps d'Hélène vieillissait
peu à peu. De même, la froide description sans plus de détails du périple de
Fleur de tonnerre au travers de la Bretagne ne m'a pas dérangée, bien au
contraire; il m'a semblé que cela reflétait le sentiment de "bien
faire" d'Hélène Jégado. J'ai également beaucoup apprécié la carte des
pérégrinations de cette tueuse présente en début de chaque chapitre.
Tout au long de
l'histoire, en parallèle de celle d'Hélène, deux coupeurs de cheveux
perruquiers entrecroisent leur route de nombreuses fois avec celle de Fleur de
Tonnerre et vont de déboires en déboires. Je n'ai pas trouvé ces personnages
intéressants, pour quelque intérêt que ce soit, et je dirais même que la scène
de fin est de trop... à tous les sens du terme.
Pour ce qui est
de la vision des croyances païennes des bretons, le celticisme mâtiné de
christianisme, j'ai trouvé certaines scènes drôles ou intéressantes (le saint
battu ou Notre Dame de la Haine) et d'autres exagérées et montrant la Bretagne
de cette époque comme un asile de fous à ciel ouvert. Certes, les mœurs des
anciens étaient étranges et parfois brutales, mais je ne pense pas pour autant
que c'était tous les jours un Pieter Bruegel ou un Jérôme Bosch....
Et c'est là, à
mon sens, un indice, un morceau, de la raison de ma non-accroche autre
qu'intellectuelle aux livres de Teulé. Je leur trouve trop de formes pour pas
asses de fond. Les effets de style (insultes, mots grossiers) sont parfois surdosés,
de même que la folie humaine ou la pauvreté et naïveté de certains. Tout est de
la même teinte chez l'humain dans ces romans, d'un gris asphyxiant
à la longue.
De même, je
trouve que pour des choix aussi passionnants de sujets, Teulé en reste souvent
à la surface, adjoignant parfois quelques lignes peu profondes, sans plus aller avant... J'apprécie cependant la retenue
dans son jugement sur les êtres qu'il nous fait croiser; aucun jugement de
valeur, aucune idéologie ne nous est jamais imposée, et c'est là un grand
respect des lecteurs et des personnages que j'affectionne dans son
écriture. Je regrette seulement que ses romans se bornent (souvent)
seulement à rapporter des faits, presque journalistiquement. Pourtant, dans
Fleur de tonnerre, un pas est fait pour sortir de cette ornière avec une courte
mais intéressante réflexion sur le rôle des parents et la transmission de leurs
peurs.
Je
suis devenue l’Ankou pour surmonter mes angoisses. Et ensuite je n’en avais
plus puisque l’angoisse ce fut moi.
A chaque
parution, je lis et dévore ses romans en attendant cette percée que tous les
grands auteurs de la misère humaine (psychologique, physique ou émotionnelle)
ont perçue et su retranscrire: la fin de Jean-Baptiste Grenouille, La guitare (encore), Les raisins de la colère, ou même le
film Le roi pêcheur. Peut-être
n'ai-je pas les bonnes références culturelles pour intégrer totalement l'œuvre
de Teulé. C'est même fortement probable. Mais il n'en reste pas moins chez moi
cette frustration à chaque fin d'ouvrage; trop de formes et pas asses de fond, un manque d'état de grâce….
Portraitiste de
génie, Teulé nous propose à chaque roman une galerie de portraits dignes de
l'école flamande; visages, expressions, éclats de malice ou de méchanceté,
bêtise portée sur les corps et les visages, c'est un régal à chaque lecture.
Ainsi, la scène où Fleur de tonnerre voit dans son ombre la silhouette de
l'Ankou est superbement décrite. Mais à ce moment-là je m'étonne du peu
de qualités évocatrices et visuelles de l'écriture de Teulé sur les fonds de
tableaux; les paysages et lieux visités, à de rares exceptions qui sont
magiques. A part quelques passages magnifiques, trop courts, j'ai du mal à
visualiser l'histoire qui m'ait contée. Des auteurs comme Tolkien, Camus,
Herbert ou Süskind ont une prégnance sur vos sens quand vous lisez leurs
romans, et cela avec une économie de moyens qui touche à l'instinctif des
sens.
Après toutes
ces critiques on pourrait croire que je n'aime pas les romans de Teulé et se
demander pourquoi je les achète ou même en fait une critique. Mais
j'apprécie Teulé, tant et si bien que j'espère une évolution de son écriture
vers du "encore meilleur". Ses romans comportent tant de bonnes
choses que ma frustration en est encore plus vive ! Je lirais donc avec plaisir
et attention son prochain roman et compte bien m'essayer à Charly 9 d'ici
peu !
Le
recteur accourt, crosse liturgique au poing,
et menace de les en besogner comme
avec une matraque :
-Attention,
j’ai la claque facile, la dent longue et la patience infiniment courte !
En résumé...
Les plus;
- Des personnages pasionnants, une gallerie de portraits riches en couleurs,
- le récit romancé d'une histoire vraie,
- une grande palette des possibles de l'humain.
Les moins;
- Quelques surdosages de gros mots ou de scénes trash et un manque de nuances,
- une écriture qui me donne du mal pour visualiser les lieux visités,
- un manque de ce petit plus qui sublime le monstrueux.
En conclusion;
Une histoire intéressante et
pittoresque, parfois un brin caricaturale, mais qui aborde le plus moche et
petit de l'humanité sans fards. Je regrette un manque dans l'écriture de Teulé
qui fait d'un bon roman un chef d'œuvre; la grâce.
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