lundi 26 mai 2014

Le passeur du temps de Mitch Albom

"-Il y a une raison pour laquelle Dieu limite nos jours.
-Laquelle ?
- Pour que chacun d'eux soit précieux."


Si vous ne lisez que ces lignes;

Un court roman tenant de la fable dont la morale porte sur le rapport que nous entretenons avec le temps dans nos sociétés modernes.... C'est un pur produit des U.S.A. et ça se sent !

Mitch Albom 

Mitch Albom, né le 23 mai 1958 à Passaic dans le New Jersey, est un écrivain, journaliste, et animateur de télévision américain. Il est connu pour ses livres à succès qu'il a fait connaitre grâce au club de lecture d'Oprah Winfrey.
Mitch Albom joue dans un groupe de rock, The Rock Bottom Remainders, avec d'autres écrivains : Stephen King, Dave Berry, Scott Turrow, Amy Tan et Ridley Pearson. Leur but est de réunir des fonds pour un programme d'alphabétisation.

 Les gens s’inquiétaient des occasions ratées, des journées trop courtes ; ils s’inquiétaient constamment de leur durée de vie, car le décompte de la vie avait conduit inévitablement au compte à rebours.


 Le pitch 

Un jour, Dor commença à compter. Les secondes, les minutes, les heures. Il fut le premier à mesurer le temps. Le premier à vouloir l'arrêter aussi... 

Ce crime lui valu d'être exilé dans une caverne, condamné à écouter toute les suppliques de ceux qui vinrent après lui – encore quelques minutes, quelques heures, quelques années.... Mais aujourd'hui, Dor peut se racheter, en allant à la rencontre d'une jeune femme, prête à mettre fin à ses jours, et d'un riche homme d'affaires malade, désireux, lui, de vivre éternellement. 

Pour les sauver, pour se sauver, Dor va devoir leur apprendre la vraie valeur du temps. 

 Le temps devint une industrie. L’homme sépara le monde en fuseaux horaires, pour mieux organiser les transports. Les trains partaient à un moment précis ; les navires lançaient leurs moteurs pour arriver à l’heure. 

Ce que j'en ai pensé

Comme souvent, mon avis ne va pas aller dans le sens du courant... Apparemment très apprécié par les internautes, ce roman m'a laissé un gout d'arnaque dans la bouche, une sensation se rapprochant de la déception stupéfiée du gourmet croyant manger un Mars et se retrouvant à mastiquer une barre allégée insipide. 

La quatrième de couverture, alléchante, contient à elle seule tout l'ouvrage, c'est vous dire... Mais je dois un mea culpa portant sur mon inatention lors de mon achat: j'ai compris la raison de ma méprise lors de mes recherches sur l'auteur; en effet, tout tient en une ligne "grâce au club de lecture d'Oprah Winfrey"...

Je n'ai rien contre Oprah, mais c'est un fait avéré que les ouvrages les plus vendus aux U.S.A sont les "how to", manuels du savoir-faire, dire, penser, manger, réussir, élever ses enfants, tailler une haie ou encore avoir une vie sexuelle épanouie, ou que sais-je encore... C'est donc bien logique qu'un bestseller américain soit un "how to" romancé... 

"How to profiter du temps car Dieu à eu raison de nous donner une fin (et de pas l'expliquer)"

Car Dieu, un mec barbu qui vous enferme pour des millénaires dans une caverne (et pas le soleil et la lune déifiés car ça c'est pour les barbares des âges anciens "sic") avait une bonne raison de ne pas donner d'explications (la science c'est le mal absolu) et va punir ici le premier type à avoir voulu s'expliquer le monde. Au moment où le barbu demande au héros pourquoi il à voulut tout mesurer et si c'était pour le pouvoir, et que Dor (le héros) répond que c'était juste pour comprendre, on aurait pu s'attendre à des excuses du dieu en question sur sa méprise et un relâchement sous conditionnelle de ce vilain libre penseur... Mais non.

Donc voilà que la science est le péché originel (tour de Babel effondrée comprise), que la seule chose que trouve à faire Dieu (god bless américa) est de laisser un pauvre type devenir fou dans une caverne où il subit les voix de milliards d'êtres humains souffrant de leur rapport au temps... Ce qui est de sa faute à Dor, car il est le premier à avoir voulu comprendre la mécanique divine. Hem ! 

Saupoudrée de petites phrases simplettes et bien pensantes, construite sur une vision du monde à la limite des créationnistes, avec des archétypes plus qu'usés (le bon berger trop curieux, l'homme d'affaire pressé qui ne croit qu'en l'argent, et l'adolescente ingrate déçue par l'amour), ce roman est une bouse cosmique tout droit venue de l’Amérique profonde. (je suis un peu en colère, il est vrai). 

Passons sur le côté "how to", évacuons pour un temps Dieu, le péché de science et tout ce qui en fait un objet de pure propagande... Reste que l'histoire en elle-même est simpliste et que la fin n'est pas à la hauteur des choses mises en place; non vieillissement du héros, pouvoir d'arrêter le temps, compréhension universelle des langues humaines... Tout ceci aurait pu mener bien plus loin et sur des chemins intéressants, mais non, Dor en restera à son rôle de brebis égarée cherchant son enclos. Aucune discussion avec Dieu, aucune colère d'avoir été enfermé et rendu quasi fou (catatonique du moins), aucun questionnement sur la conscience du temps propre aux humains à mettre en rapport (peut-être) avec le libre arbitre, notion pourtant si chère aux lecteurs du Deutéronome... 
  
Y compris donc, sur le plan religieux, c'est à une barre allégée que j'ai eu affaire. En effet, il faut bien peu de culture mystique pour ne pas savoir que les écrits référents en la matière sont faits de discussions, de remises en questions et ne se bornent pas à une bête obéissance. La Bible, le Talmud, le Zohar, Le Coran, les écrits de Sainte Catherine de Sienne, de Saint François d'assise ou encore de Saint Augustin ou d’Hildegarde de Bingen  (pour jouer le jeu et ne rester que dans la chrétienté), sont des discussions sur et autour de la Création... 

Pour finir, ce « roman » a provoqué en moi une réflexion sur le rôle des éditeurs dans la propagation d’idées et de modes de pensées délétères. Faut-il tout éditer ? Les éditeurs n’ont-ils pas pour rôle de filtrer tant au niveau de la qualité des histoires et écritures qu’au niveau des pensées véhiculées ? 

Dans ses remerciements, Mitch Albom explique néanmoins qu’il « n’émet aucun jugement sur la science de la cryogénisation, ni sur les choix des praticiens et de leurs patients ». Ouf : nous voilà sauvés ! (Passons sur le fait que la cryogénisation n’est pas une science mais une technique….) J’attends avec un plaisirs morbide le roman que nous pondra Albom sur l’avortement et les techniques de procréations assistées selon Dieu ! 

Loin de moi l'idée de critiquer ceux et celles qui ont apprécié ce roman; la morale de l'histoire, pour simple qu'elle est, à bien évidemment pu reconnecter certains avec une notion du temps plus humaine et dans le vécu que dans l'efficience. Je comprends que ce petit roman ait pu en aider certains. Je regrette néanmoins que, par son existence, ces lecteurs soient passés potentiellement à côté d'ouvrages bien plus nutritifs et contenant néanmoins le même message de base sans les adjuvants white protestants.

 

En résumé... 


Les plus; 
  • Un roman court qui se lit vite,
  •  une morale bien pensante qui peut plaire ou aider certains, 
  • une trés jolie couverture.
Les moins;
  •  Une propagande anti-science et trop bigote à mon gout,   
  •  une histoire trop simple sans surprise,
  • une moralité prémachée sans ouverture à la reflexion du lecteur.

En conclusion;

 Vous l'aurez compris, à mon sens, ce roman ne mérite  d'être lu que si vous le trouvez chez un ami aux toilettes. Sorte de "how to" romancé, imbibé des idéaux white protestants de l'amérique profonde, ce roman ne m'a pas non plus passionnée sur le plan de l'histoire qui nous y est racontée.


 cités dans cet article; 







  pour aller un peu plus loin; 











2 commentaires:

  1. kikou,
    S'il a bien un auteur que je ne pensais pas que tu lirais c'était bien celui-là, lorsque j'ai vu que tu avais écrit une chronique je suis venu voir... ton avis me soulage ! lol! ^^

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  2. je me suis fait avoir mais on ne m'y reprendra plus ! en même temps, c'est bien aussi de voir un peu comment d'autres pensent... à petite doses !

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